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Titel
De la vague à la tombe. La conquête néolithique de la Méditerranée


Autor(en)
Guilaine, Jean
Erschienen
Paris 2003: Editions du Seuil
Anzahl Seiten
375 p.
Preis
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Rezensiert für infoclio.ch und H-Soz-Kult von:
Elena Burri

Jean Guilaine, spécialiste reconnu depuis plus de 30 ans, propose une compilation d’une quinzaine d’articles et de conférences datant de la fin des années 1990 et réactualisés depuis. Cet éventail, qui s’adresse à l’amateur averti, fournit une vision très complète des connaissances sur le Néolithique de l’Ouest de la Méditerranée. Les articles collectés sont regroupés selon trois thèmes principaux: «la vague» à savoir l’éclosion et la diffusion du Néolithique à partir du Levant en privilégiant la Méditerranée et ses côtes européennes, puis l’évolution des sociétés néolithiques de la Méditerranée occidentale opposées à leurs voisines continentales, enfin «la tombe», l’apparition et l’évolution du mégalithisme. Le champ des études est donc vaste puisqu’il couvre les sociétés néolithiques et du début de l’Age du Bronze des côtes méditerranéennes et de la façade atlantique de l’Europe entre les Xe et IIIe millénaires av. J.-C.

Le recueil commence par la leçon inaugurale de l’auteur, titulaire de la chaire des «civilisations de l’Europe au Néolithique et à l’Age du Bronze» au Collège de France. Il s’agit d’une mise en perspective très généraliste des études néolithiques. Y sont évoqués les aspects des sciences environnementales indispensables à l’étude de l’anthropisation du territoire, du lent passage des espèces sauvages aux domestiques, puis la diffusion du Néolithique par voie maritime en Méditerranée, enfin la hiérarchisation de la société, dont les tombes mégalithiques sont un symptôme, qui préfigure les sociétés urbaines. Cette vue d’ensemble donne un programme des questions qui seront traitées par la suite entre rythmes de diffusion du Néolithique, émergence du mégalithisme, part du symbolisme, …

La révolution néolithique nous fait suivre la sédentarisation des populations, la transition lente entre récolte sélective et agriculture et la transformation progressive des morphologies des animaux. J. Guilaine évoque les foyers dans lesquels émergèrent indépendamment les Néolithiques du Levant, d’Asie, d’Amérique, de Polynésie, d’Afrique et les questions, sans réponse univoque, du pourquoi de ce changement culturel fondamental. Pour la Méditerranée, les débuts de la domestication prennent place au IXe millénaire en Anatolie, puis l’Europe est peu à peu onquise, par voie terrestre ou maritime. Cette conquête se fait en plusieurs temps, avec des pauses, des retours en arrière, des accélérations pendant qu’au Proche-Orient la société se complexifie.

Après cet article généraliste, on passe aux débuts du Néolithique à Chypre où J. Guilaine conduit des fouilles depuis plusieurs années. On y découvre la colonisation de l’île dès la seconde moitié du IXe millénaire et l’évolution des cultures néolithiques à partir de plusieurs sites archéologiques précisément décrits.

Ensuite un article beaucoup plus généraliste traite de la diffusion de l’agriculture en Europe et de la mise en place du Néolithique en suivant le Danube et ses affluents ou par voie maritime entre 8500 et 4000 av. J.-C. J. Guilaine propose plus loin une stratigraphie du Néolithique méditerranéen montrant la pluralité du premier Néolithique à céramique imprimée. L’article suivant traite de ces premiers paysans des îles tyrrhéniennes, du sud de la France et de la péninsule ibérique dans le courant du VIe millénaire av. J.-C. Un survol par région tente de répondre aux questions des liens avec les chasseurs-cueilleurs aborigènes et de la provenance des premiers Néolithiques.

La suite traite des oppositions entre la Méditerranée et l’Europe continentale tout au long du Néolithique: le courant de néolithisation maritime contre celui des Balkans, l’émergence de la métallurgie dans les Balkans contre le mégalithisme occidental, la partition nord/sud visible dans les civilisations du Bronze. Après l’Europe, c’est l’Atlantique qui fait face à la Méditerranée avec sa néolithisation à partir de la Méditerranée, puis son émancipation et l’invention du mégalithisme, très antérieur à celui du sud. Les pratiques funéraires prémégalithiques de Méditerranée occidentale sont détaillées dans l’article suivant avec les tombes individuelles en coffre sous tertre à mobilier parfois très riche. Ensuite, J. Guilaine décrit en détail l’évolution architecturale des temples et des hypogées de Malte, puis le mégalithisme de Méditerranée occidentale, avec les dolmens à couloir du Néolithique récent, enfin les hypogées du sud de la France qui nous mènent à la fin du IIIe millénaire.

Plus loin, il est question de la Corse opposée à la Sardaigne, avec une évolution du funéraire et des influences contrastées entre les deux îles, puis des îles Baléares qui sont néolithisées tardivement et connaissent une évolution originale jusqu’aux maisons cyclopéennes.

Le dernier article porte sur la statuaire néolithique, avec des comparaisons un peu cavalières entre les statues-menhirs du sud de la France et les représentations de pharaons divinisés.

L’épilogue reprend les principaux points soulevés depuis le début du Néolithique jusqu’à l’Age du Bronze. Ici aussi, des hypothèses sur les sociétés esclavagistes de l’Age du Bronze reposent sur des bases non explicites.

Au bilan, malgré ses indéniables qualités scientifiques, le livre n’échappe pas aux défauts de l’exercice. En effet, la lecture de ce recueil est parfois frustrante tant les articles sont hétéroclites dans leur forme, sont parfois redondants, alors que les synthèses font défaut, et surtout tant le traitement des questions sociales ou symboliques est discutable. On suit néanmoins les développements récents des connaissances et des hypothèses au long des articles qui font montre d’une érudition certaine et de qualités scientifiques à la pointe des connaissances, secondées par une riche illustration.

Citation:
Elena Burri: compte rendu de: Jean Guilaine: De la vague à la tombe. La conquête néolithique de la Méditerranée. Paris, Seuil, 2003. Première publication dans: Revue suisse d’histoire, Vol. 56 Nr. 2, 2006, S. 230-231.

Redaktion
Veröffentlicht am
20.12.2011
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Die Rezension ist hervorgegangen aus der Kooperation mit infoclio.ch (Redaktionelle Betreuung: Eliane Kurmann und Philippe Rogger). http://www.infoclio.ch/
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